Princesse Pauline de Metternich - Souvenirs 1859-1871 -
Une jolie laide
Chez les marchands de livres d’occasion c’est le livre qui vous trouve alors que dans les librairies vous trouverez le livre que vous recherchez.
Le livre qui m'a trouvé : les souvenirs de la princesse Pauline de Metternich.
A cette époque, le si brillant second empire français, les femmes adoraient le plaisir et les futilités des mondanités tout en affectant de dédaigner la politique. Une soirée d’opéra réussie était une soirée où la parité hommes-femmes était respectée dans les loges pour le plaisir de l'œil, le spectacle étant sur scène et dans la salle.
Au soir de sa vie Pauline de Metternich évoque ses douze années de femme d’ambassadrice d’Autriche en France sans évocation d’intrigues politiques, sans mention d’écrivains ou d’artistes non rencontrés, d’évènements traversés autres que ceux où elle avait jouée un rôle. Ce récit rend hommage au couple impérial Napoléon III et Eugénie qu’elle a aimé.
A Biarritz premier jugement de Mme Carette : ” la femme de l’envoyé extraordinaire d’Autriche, extraordinaire à d’autres titres que son mari, doit à ses excentricités une certaine faveur “. Prosper Mérimée (13 juin 1861) : “ nous avons la princesse Metternich qui est fort vive, à la manière allemande, c’est à dire qui se fait un petit genre d’originalité composé de deux parties de lorette et d’une grande dame “.
En représentation Mme Carette l’a décrite ainsi : “ lorsque la princesse Metternich entrait aux Tuileries un soir de bal, très mince, maigre même, assez grande, avec ses épaules très découvertes, son front chargé de diamants, ses longues jupes traînantes, il était impossible d’avoir meilleure grâce, ni plus grand air ; elle avait cette allure aristocratique inimitable que donnent la naissance et le milieu dans lequel on a vécu ; c’était bien l’ambassadrice fière de représenter un grand pays ! “
D’elle elle disait : “ je ne suis pas jolie je suis pire “
Les frères Goncourt, les deux cafards de notre littérature la décrivaient ainsi dans leur Journal : “ nez en trompette, des lèvres en rebord de pot de chambre, très pâle, l’air d’un masque de Venise dans les tableaux de Longhi “.
Selon Mme Carette : “ quand on peut dire d’une femme ce qu’on disait de Mmme de Metternich : c’est une jolie laide, il faut qu’elle ait infiniment de charme. Je ne sais si la bouche était trop largement fendue, les lèvres trop fortes, si les narines relevées donnaient au nez une courbe imprévue, si l’ovale était irrégulier, mais rien n’était plus agréable à regarder que cette physionomie mobile et spirituelle éclairée par deux beaux yeux bien souriants “.
Sa pétulance, sa personnalité faisaient oublier sa bouche épaisse, ses traits irréguliers.
Dès son premier contact avec la Cour, l'ambassadrice parle fort, plaisante, rit , virevolte, joue du piano, fume de gros cigares et se lance parfois dans des numéros de chant ou de danse dignes du boulevard le plus populaire. On l’a vue écrit Mme Baroche abdiquant l’orgueil de son blason, ses jupes courtes relevées exécuter avec un écuyer certaine danse très expressive, à parler net : pincer un cancan “ ( malgré les protestations timides de son mari ).
Prosper Mérimée observait : “ pour le bouquet, la princesse de Metternich un figurante de l’Opéra : maillot, jupon court, tunique de gaz. Elle dansa, cabriola, montra tout ce qu’il y avait sous cette tunique, but trois verres de champagne. Bien que laide comme un singe, elle fut si espiègle, si étourdie qu’elle s’en alla plein de succès. “
Au gré des souvenirs plein de fraîcheur de la princesse de Metternich nous allons de Biarritz ( les récits d’une ascension sur la montagne de la Rune et d’une promenade en mer valent des récits de Jerome.K.Jerome )
Fêtes, bals, bals masqués, jeux de société, charades, tableaux vivants la princesse selon Mme Carette était : “ l’âme de la série d’invités avec lesquels elle se rencontrait, s’intéressant à tout, répandant autour d’elle son esprit et sa gaieté, entraînant jeunes et vieux dans le mouvement de ses idées, tour à tour enjouées ou sérieuses, jamais banales “.
On a gardé en mémoire le jeu du secrétaire ; Prosper Mérimée de faire la fameuse dictée de l’Académie. On éclata de rire à la figure consternée de l’académicien Octave Feuillet ( 19 fautes ) et de l’homme de lettres Alexandre Dumas, le fils ( 24 fautes ).
SOURCE : Souvenirs : 1859-1871 Princesse Pauline de Metternich-La bibliothèque d'Eveline Lever-Tallandier-ISBN : 978-2-84734-541-4 Dépôt Légal : novembre 2008.